AVRIL l59I.                               145
chancelier de l'Union, sortist de bon matin la ville de Paris, et emporta quant et lui les seaux. Bruit fut in­continent qu'il s'en estoit fui, et qu'il s'en estoit allé à Saint-Denis remettre lesdits seaux entre les mains du Roy; duquel bruit les Seize faisoient aucteurs les poli­tiques, encores que ce fussent eux-mesmes qui le fissent courir ; et ce à dessein pour couvrir un stratagesme qu'ils brassoient dessous, et pour lequel ledit chancelier estoit allé trouver le duc de Maienne.
Aussi tost qu'il fust parti, ses creanciers firent tout saisir en sa maison, jusques à son lit et à sa garse, qu'ils trouverent encores dedans toute endormie.
Le mecredi «2.4 du present mois d'avril, dans le clos des Jacobins à Paris, furent, par sentence du grand prevost Oudineau, pendus et estranglés sept soldats maheustres (quolibet donné à ceux qui tenoient le parti du Roy) qui estoient du chasteau de La Martiniere; et y en eust lin, lequel estant à Feschelle confessa qu'il avoit estrangle pour sa part jusques à douze ligueus de Paris; et ung autre qu'ayant pris deux pauvres diables de Ia dite ville (ce furent ses termes), il leur avoit coupé à chacun les deux bras; puis Ies leur auroit re­jetté, disant qu'ils s'en retournassent à Paris les porter, et que c'estoit de la chair fresche pour les ligueus. Actes vraiement barbares et trés-cruels, dignes de mil gibets.
Ce jour fust tenu conseil à Paris au logis du lieute­nant La Bruiere, pour emprisonner quelques politiques et chasser les autres. Mais ce conseil n'eust lieu, aiant esté remonstré par un des Seize le peu de proufit qu'on tiroit tant des emprisonnemens que des billets.
Le jeudi vingt-cinquiéme du present mois d'avril, comme le Roy passoit par le village de Ruelle pour 46.                                                           10
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